Protéger son patrimoine culturel, un travail d’équipe
Une demeure ancienne, une peinture historique, un instrument scientifique d’époque… Un propriétaire peut faire inscrire ou classer son bien aux Monuments historiques afin de bénéficier d’un accompagnement de l’État pour sa conservation. À l’occasion des Journées européennes du patrimoine, nous nous sommes intéressés à ces démarches encadrées par le législateur.
Chaque année, environ 300 bâtiments ou sites et 1 500 objets remarquables sont protégés au titre des Monuments historiques, révèle le ministère de la Culture1. Pour le détenteur de patrimoine culturel, le classement ou l’inscription au registre permet de partager les procédures d’expertise et les coûts de conservation avec l’État, afin de le préserver. Mais la démarche répond à un examen rigoureux et elle implique le respect d’obligations strictes. L’appui d’un avocat est recommandé tout au long du processus.
Quels sont les objets ou biens immobiliers pris en compte ? Il est possible de protéger de nombreux types de bâtiments : demeures, fermes, usines mais aussi parcs et jardins, ouvrages d’art, vestiges archéologiques et grottes. S’agissant d’objets, toutes les catégories sont admissibles : peinture, sculpture, mobilier, textile, orfèvrerie, véhicules, instruments de musique, outils industriels, scientifiques et techniques, etc. C’est en premier lieu leur caractère historique qui doit être avéré. En principe, l’État n’accepte pas de protéger les biens qui ont moins de 50 ans.
Des contraintes fortes sur les travaux de conservation
Deux régimes de protection existent : le classement ou l’inscription aux Monuments historiques. Dans le premier cas, les travaux de conservation sont soumis à un accord du préfet et, pour les immeubles, la maîtrise d’œuvre doit être confiée à des professionnels dotés d’une qualification spécifique. Dans le second cas, les travaux doivent être précédés de la délivrance d’un permis ou faire l’objet d’une déclaration préalable, qui interviennent tous deux après accord du préfet de région. Quel que soit le régime de protection, le chantier doit être réalisé sous le contrôle des services de l’État.
Ces contraintes ne concernent cependant pas les travaux d’entretien courant, que le propriétaire peut engager sans formalité.
Il faut aussi retenir que le détenteur de biens culturels, qu’ils soient inscrits ou classés, a toujours la responsabilité de leur conservation et qu’il est tenu de s’en occuper. L’État peut le mettre en demeure d’engager des travaux et le préfet peut ordonner leur exécution aux frais du propriétaire. A défaut de quoi il peut engager une procédure d’expropriation. En contrepartie, l’entretien et la conservation des immeubles bénéficient de plusieurs dispositifs fiscaux majeurs, notamment une réduction d’impôt pour travaux (loi Malraux) mais aussi une déduction des déficits fonciers (sous conditions) et une déduction des charges foncières.
Un objet protégé ne peut pas quitter le territoire français
Par ailleurs, la vente d’un bâtiment, d’un terrain ou d’un objet protégé reste possible. À condition, toutefois, de la déclarer en préfecture de région dans les quinze jours qui suivent la cession et d’informer l’acquéreur que le bien est protégé. Pour leur part, les objets sont interdits d’exportation : il est interdit de leur faire quitter le territoire français. Leur déplacement pour un prêt ou une exposition restent autorisés mais ils sont soumis à une déclaration préalable. Pour organiser le transport, le propriétaire peut demander l'assistance technique des services de l’État chargés des monuments historiques. Par ailleurs, au moins tous les cinq ans, ces derniers procèdent au contrôle de leur présence chez leur possesseur et de leurs conditions de conservation.
Comment faire classer ou inscrire son bien ? Les demandes doivent être adressées au préfet de région. Il faut y joindre un dossier constitué d’un descriptif de l’objet ou de l’immeuble, de photographies, et, bien sûr, de tous les éléments démontrant son intérêt historique. S’agissant des objets, le propriétaire devra attester de leur intérêt artistique, scientifique ou technique. Les informations concernant l’histoire et la fabrication ou la construction, quand elles existent, sont un atout supplémentaire.
Accéder au formulaire de demande de protection
Le classement au titre des monuments historiques est prononcé par le ministre
Le dossier est examiné par la Commission régionale du patrimoine et de l’architecture, qui réunit des élus, des personnalités qualifiées (universitaires, architectes, historiens, paysagistes, juristes), des représentants d’associations, ainsi que des représentants de l’État. Celle-ci évalue l’intérêt patrimonial et historique d’un édifice ou d’un objet. Pour les biens meubles, elle s’intéresse notamment à leur qualité artistique ou technique, leur authenticité, leur rareté, leur représentativité par rapport à un corpus ou à un type.
Dans le cadre d’une procédure d’inscription, la Commission rend ensuite un avis au préfet. Pour un classement, elle transmet le dossier à la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture qui va, à son tour, examiner les documents. C’est le (ou la) ministre de la Culture qui prononcera ensuite la décision de classement, pour tout ou partie du bâtiment. Dans certaines circonstances, rares, la démarche initiale n’émane pas du propriétaire mais de l’administration : des biens peuvent être inscrits ou classés sans que leur détenteur ne l’ait demandé, au nom de la protection du patrimoine français.
Source
Au 1er janvier 2021, 44.540 immeubles sont protégés au titre des monuments historiques, dont 14.235 immeubles classés et 30.305 immeubles inscrits. À la même date, plus de 260.000 objets sont protégés au titre des monuments historiques, dont plus de 120.000 classés et près de 140 000 inscrits. Source : ministère de la Culture